Le stage de fabrication de papier décoré 2012

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Le stage

Ambiance du stage papierFig.1 : On s'amuse plus que l'on travaille !

Chaque année, l'Atelier de Rochebonne crée un stage de fabrication de papier décoré qui réunit une dizaine de stagiaires dans une bonne ambiance. La fabrication de papier décoré est une activité à la fois utile et ludique. Utile, car elle permet de créer "sur mesure" les papiers qui serviront aux couvertures de livres ou aux pages de garde  ; chacun ayant la possibilité de créer selon ses besoins et sa sensibilité  : la couleur, la matière, la densité ou le motif du décor. L'aspect ludique est loin d'être négligeable, il est même essentiel, car quoi de plus drôle que d'essuyer ses mains pleines de colle d'amidon sur son tablier, quoi de plus amusant que de faire des petits pâtés de peinture, ou de faire flotter des couleurs ... Et puis, l'atelier étant situé dans une ancienne école maternelle, les petits plaisirs doivent être à la hauteur du lieu  !

Les techniques de fabrication de papier décoré sont nombreuses et très variées, et une étude complète demanderait beaucoup de temps, toutefois la journée a permis d'aborder le papier à la colle, le papier déchiré et le papier marbré à la cuve, si bien que tour à tour, les relieurs sont devenus dominotier, plasticien, puis marbreur. J'allais oublier gastronome, car l'heure de midi a été réservée à un banquet entre amis, servi des mets les plus fins et des meilleurs vins...

Chaque stage surprend par la qualité des réalisations et la créativité des stagiaires. Mais plus que d'habitude, celui-ci a été à l'origine d'une production très riche. Dans cet article, je balayerai les principales techniques mises en œuvre, illustrées par quelques photographies prises durant cette journée.

Le papier à la colle

Le papier à la colle est une technique très ancienne et particulièrement simple à mettre en œuvre, car elle consiste à mélanger de la couleur avec de la colle. Les couleurs peuvent être des pigments naturels, de la gouache ou de la peinture acrylique. La colle peut être au choix de la colle de pâte (farine cuite à l'eau), de la colle d'amidon de riz ou de la colle méthyle-cellulose (colle à papier peint).

Mise en œuvre du papier à la colleFig.2 : Papier à la colle en cours de réalisation

La couleur et la colle très liquide sont mélangées et travaillées en motif sur une feuille de papier préalablement mouillée. La colle étant chargée avec beaucoup d'eau, l'artiste-dominotier peut travailler avec beaucoup de matière, jouer sur la transparence ou sur la fluidité du mélange. La mise en œuvre doit être rapide, car l'eau s'évapore en partie et pénètre dans le papier.

Cette technique offre un choix très large d'effets, et comme le procédé est facile à maîtriser, il assez facile de reproduire le même effet ou le même motif, et créer des séries de papiers, qui sont très utiles lorsque l'on relie des œuvres composées de plusieurs volumes.

Les effets et motifs sont réalisés avec les outils les plus inattendus : les dents d'une fourchette, des éponges, des dominos, des pommes de terre taillées en forme, ou comme sur la photographie (fig.2) avec une éponge métallique  !

Voici un petit échantillon de ce qui a été créé, où sur une note assez abstraite, aucun papier ne se ressemble.

Echantillon de papier à la colleFig.3 : Trois exemples de papier à la colle

Le papier déchiré

L'artiste et le papier dechireFig.4 : C'est moi qui l'ai fait !

Le papier déchiré est une technique moderne, qui est promue en France par Florian Rousseau. Le procédé est plutôt simple et le résultat très surprenant. C'est une technique où l'on détourne la matière, on la modèle, on la recycle, et plus l'artiste détourne la matière de son premier usage, plus il éprouve du plaisir.

Techniquement, on déstructure des matériaux que l'on colle, que l'on ponce, que l'on colore, et dont on traite la surface ... enfin, c'est le principe et fil conducteur, car on peut faire un peu ce que l'on veut et ce que l'on ressent devant la matière première  ! Le résultat ressemble souvent à des matériaux usés, patinés, lustrés...

Pour cette journée, les stagiaires ont utilisé des magazines déchirés en bandes, puis collées entre-elles sur du papier. Après avoir pressé le collage, il a été délicatement poncé avec du papier abrasif très fin. Enfin, la mise en couleur a été réalisée avec du colorant à l'aniline mélangé avec de l'alcool. Pour terminer, après séchage le papier décoré a été traité simplement à la cire d'abeille. Le résultat fut un papier ayant pour certains l'aspect visuel du bois et pour d'autres celui de la tôle d'acier.

Mais quoi de plus parlant que de montrer un échantillon des créations (fig.4 et 5) de nos artistes-plasticiens dont voici une photographie.

Echantillons de papier dechireig.5 : La création de papier déchiré.

Le papier marbré à la cuve

Papier marbréFig.6 : L'artiste "patouille" ....

Le papier marbré à la cuve est par nature le papier décoré qui fait rêver, il est chargé d'une certaine noblesse, il est reposant pour l'œil et l'esprit, bref il est harmonieux. C'est le papier décoré traditionnel inventé durant le moyen-âge par les persans, maîtrisé par les turcs et introduit en France à la fin du XVIIème siècle, alors que la France hébergeait les meilleurs relieurs.

Si l'on rêve devant ce type de papier décoré, c'est aussi parce qu'il n'est pas aussi aisé à fabriquer qu'il y parait  : les recettes ne sont pas secrètes mais la mise en œuvre est délicate... Le principe de base est de faire flotter de la couleur sur un bain d'eau dont la densité a été augmentée par l'addition d'un gel. La couleur est projetée sur la surface du bain, elle flotte et se disperse, le marbreur réalise des dessins en forme de volutes, puis il dépose sa feuille de papier sur le bain, la couleur pénètre dans le papier par capilarité, il retire sa feuille la rince et la sèche.

Le bain est constitué d'eau douce mélangé avec un gélifiant : de la colle méthyl-cellulose, de la gomme agar-agar, de la gomme adragante ou de la gellose de caraguen. En réglant la densité du bain, les motifs varient  ; avec un bain très liquide, on obtient l'effet "caillouté" typique des papiers de garde du XIX ème siècle  ; avec un bain peu liquide, la couleur se déplace très peu et on peut travailler les motifs en volutes typiques des papiers de garde du XVIII ème siècle.

Le professeur de marbrureFig.7 : Tiens, il y a une tâche !
 

La couleur est composée traditionnellement de pigments naturels préparés à l'eau, au fiel de bœuf et à l'alun, mais il est plus facile de travailler avec des encres typographiques (grasses) ou des encres à l'eau, de la peinture à l'huile ou de la peinture acrylique. La difficulté étant de faire flotter la couleur en réglant sa densité par rapport à celle du bain ...

Les grands marbreurs ont une telle maîtrise de leur art qu'ils parviennent à réaliser des véritables chefs-d'œuvre, cet art traditionnel turc est nommé : Ebru. La maîtrise du motif est obtenue par l'ordre dans lequel les couleurs sont déposées et la capacité à se repousser entre-elles. Durant le stage, nous avions un vert très dispersant, comme le montre la photographie (fig.6).

Pour conclure ...

Et pour conclure ce petit reportage... vous aussi, vous pouvez acquérir ces compétences en vue de réaliser vos chefs-d'œuvre, mais pour cela il faut nous rejoindre à l'Atelier de Rochebonne de Saint-Malo.

A bientôt !

Eric Boulet - 15 janvier 2012


Photos Eric Boulet - 2012 ©

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